20. Immoralité et consumérisme

Ce que cette histoire nous révèle est capital. Edward Bernays savait que lorsque la morale s’efface, le consumérisme se propage. Il a donc entrepris de briser un tabou tenace : celui du tabagisme féminin, afin que les investisseurs puissent accroître leurs profits.

Tout comme les fabricants de cigarettes de cette époque, notre société est soumise à l’impératif de croissance économique : il faut vendre et produire toujours plus de richesses, et pour ce faire, le monde occidental n’a pas d’autre choix que de « déconstruire » son propre héritage moral, dans l’espoir de créer de nouveaux comportements consuméristes qui n’existaient pas auparavant.

Origine et sens de la morale

Le problème, c’est que la morale est nécessaire à l’équilibre d’une société. Elle est apparue dans un but précis : émanciper l’individu de ses propres pulsions, afin qu’il vive en harmonie avec les siens. C’est ainsi que sont apparus les commandements bibliques tel « tu ne tueras point ». De nos jours, cette leçon nous semble évidente, mais il n’en a pas toujours été ainsi. Il reste possible à cet égard que cette tentation vous gagne, fût-ce inconsciemment, sous le coup d’une colère passagère ou d’une jalousie intense. C’est humain, et pourtant nous ne cédons pas à cette envie, parce que nous avons appris à modérer nos instincts.

D’autres commandements, tels que « tu ne voleras point » ou « tu ne commettras pas d’adultère », ont également contribué à façonner notre civilisation, en dépit des tentations qui peuvent nous inciter à commettre ces péchés. Il est donc crucial de souligner ce qui suit : la modération des comportements n’est pas quelque chose d’inné. Elle s’acquiert dans le cadre d’un processus éducatif particulièrement long et rigoureux, « car la chair, dit la Bible, a des désirs contraires à l’esprit, et l’esprit en a de contraires à la chair ».

Parmi les œuvres de la chair figurent, selon les Saintes Écritures, « l’adultère, la fornication, les querelles, la jalousie, les disputes, le meurtre, les ivrogneries, la débauche et toutes les choses semblables. Ceux qui commettent de telles choses, conclut ce passage, n’hériteront pas du Royaume des cieux, car les fruits de l’Esprit sont la charité, la joie, la paix, la patience, la bonté, l’amour, le bien, la fidélité, la tempérance ».

Société de consommation

La morale chrétienne est certes l’une des expressions les plus connues de l’enseignement traditionnel, mais elle n’en est pour autant pas la seule. Fort longtemps avant elle, le philosophe Aristote mettait déjà en garde contre les dérives induites par nos propres sentiments, ainsi que nos émotions et nos tentations, qui « privent l’homme de sa faculté à raisonner ».

Le problème, c’est que cet enseignement est incompatible avec l’impératif de croissance qui caractérise notre société. Car le consumérisme n’a pas besoin de sages ni de philosophes qui se gardent de céder à leurs tentations, mais bien au contraire de gens « qui se lâchent » sans aucune forme de retenue. Le consumérisme implique à cet égard de consentir à l’excès. Il suppose de se soumettre à toutes les pulsions qui traversent nos corps. Par conséquent, l’humanité nouvelle dont le monde moderne a besoin est plus que jamais émotive, impulsive et compulsive. C’est pourquoi notre société promeut tant que faire se peut les comportements les plus débridés qui soient : YOLO et carpe diem ! Au nom du profit, personne ne doit plus entendre parler de retenue comportementale. Il s’agit de délaisser notre morale et nos traditions. Alors au diable nos vieux enseignements de modération. On disqualifiera socialement ceux qui persisteront à s’en réclamer. On dira d’eux qu’ils sont ringards, « réacs » et parfois même « fascistes ». N’essayez pas de comprendre. Contentez-vous de consommer. Soumettez-vous aux désirs que les communicants stimulent dans votre inconscient, et surtout prenez du plaisir, encore et encore, jusqu’à ce que vous deveniez accros à ce mode de vie.

Soumission consentie

Indéniablement, l’idéologie du Progrès est séduisante. Car même le plus sage d’entre nous ne cessera jamais d’être tenté. Nous apprenons certes à dominer nos pulsions, mais il n’est pas possible de s’en défaire totalement. Elles continuent de vivre en nous. Le Système se consacre donc à les solliciter, beaucoup plus qu’elles ne sont naturellement censées l’être, jusqu’à ce qu’on y cède.

Alors on cède. Cela peut arriver n’importe quand, dans un moment de faiblesse par exemple. Ce n’est pas quelque chose de grave, car on se contente généralement de céder avec modération. Et puis, à force, cela devient une habitude. Il faut dire que nos vies ne sont pas toujours simples. Le travail et le stress nous incitent à relâcher la pression. C’est ainsi que, peu à peu, la soumission consentie aux pulsions qui nous traversent devient un véritable mode de vie, et nous devenons ainsi les esclaves du monde moderne.

Ainsi, et afin de ne nous laisser aucune chance d’y échapper, nos sociétés modernes sont devenues progressivement le lieu d’une hypersexualisation du désir. Ce n’est pas surprenant, car le plaisir charnel est de toutes nos tentations la plus puissante et incontrôlable qui soit. C’est elle qui plus que toute autre est susceptible de nous convaincre de nous « laisser aller », au point de renoncer peu à peu à toutes les frontières morales que l’on s’était précédemment imposées. C’est elle qui plus que toute autre nous conditionne au diktat de nos propres émotions. C’est elle qui plus que toute autre peut nous convaincre de renoncer aux limites qui jadis garantissaient notre liberté. Le système est malin. Il sait que nul n’est plus esclave que celui qui chérit ses chaînes : celles du désir, celles de l’envie, celles du plaisir.

Il n’est pas surprenant, dans de telles conditions, que notre société soit devenue le vecteur de tout un tas de revendications d’apparence « libertaires », à l’instar des discours ultra-déconstructivistes que revendiquent les LGBT. Le but est ici inchangé : inciter les peuples à l’abandon progressif de leurs anciennes frontières morales. Célébrer l’exubérance individuelle et l’impulsivité sexuelle au profit d’une société nouvelle et outrancièrement consumériste.

Déconstruction et éducation

L’enseignement public français contribue largement au conditionnement mental de notre jeunesse, comme en témoigne le propos suivant de Vincent Peillon, ami revendiqué des francs-maçons et ancien ministre de l’Education nationale, dans un ouvrage intitulé La Révolution française n’est pas terminée.

L’auteur y déclare sans détour que la morale laïque – c’est-à-dire déconstruite – « doit permettre à tout un chacun de s’émanciper dans le respect des libertés ». Mais de quoi précisément les progressistes voudraient-ils nous émanciper ? La réponse est donnée plus loin : « Il faut être capable d’arracher l’enfant à tous ses déterminismes : familial, ethnique et culturel… » Il s’agit donc ici d’une « libération » dans la déconstruction cognitive totale. Cette méthode devrait nous inciter à la plus grande méfiance. Notons que Vincent Peillon n’a pas jugé utile d’en appliquer le principe à ses propres enfants, dont les prénoms ne révèlent aucun souhait apparent d’éducation « déconstruite ». Il serait donc légitime de demander pourquoi les progressistes ont si souvent tendance à prôner pour les autres enfants presque tout l’inverse de ce qu’ils réservent aux leurs. Le lecteur trouvera sans doute « par lui-même » l’explication qui lui semblera la plus juste.

Ce chapitre est extrait d’un ouvrage intitulé 01-Tradition : Echapper à la catastrophe sociale, écologique et migratoire.

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